Curieusement, alors que l’Europe se déchristianise rapidement, les médias n’ont jamais autant parlé de religion, et ce à travers l’élection du pape. Mais il s’agissait plutôt d’une approche laïque, voire politique. Il aurait peut-être été utile, par les temps qui courent, de rappeler le commandement de l’évangile : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », l’un des plus importants de la religion chrétienne. Une déclaration révolutionnaire par rapport aux dieux plutôt éloignés et féroces des cultes païens de l’époque. Mais qui surtout deux mille ans plus tard n’a rien perdu de son actualité. La violence est toujours présente. Les écrivains, comme des vigies, essayent d’en comprendre les rouages.
En relisant le roman L’autre moitié du soleil de l’autrice nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, une grande fresque épique sur les violences qui ont sévi au moment de la décolonisation du Nigéria, j’ai redécouvert la tragédie de la guerre du Biafra. Des bains de sang ont coulé entre populations voisines justement, les Ibos du Sud Est christianisés par la force et les Haoussas du nord musulmans. Le roman de Chimamanda Ngozi Adichie a reçu en 2007 le prestigieux prix britannique Orange Prize aujourd’hui Women’s Prize for Fiction. Il a été adapté en film en 2013, sous le titre Half of a Yellow sun. Au travers de la vie de deux sœurs, Olanna et Kainene, revenues d’Angleterre au Nigéria, la romancière nous donne à voir les déchirures d’un pays en devenir, d’autant plus impitoyables et féroces qu’il s’agit de peuples frères. Ou de voisins devenus amis. Olanna découvre en effet lors du massacre de sa famille dans un petit village que l’un des tueurs n’est autre que le propre ami de son oncle Mbaezi, un vendeur de claquettes en cuir qui l’avait invitée chez lui. Abdulmalik est un Haoussa qui tenait l’échoppe voisine de son oncle au marché. Avec horreur, lors de sa fuite organisée par son ami musulman Mohammed, elle l’entrevoit sur la route, équipé de hache et de machette. Il se vante « d’avoir achevé toute une famille. »
Guerre entre peuples frêres
La réalité oblige à reconnaitre que l’on se massacre le mieux entre proches. Et que le commandement « aime ton prochain comme toi-même » est largement rangé aux oubliettes, même si la bible est le livre le plus lu au monde. Ukrainiens et Russes en sont un autre exemple tragique. Une guerre sans raison entre des peuples frères slaves dont les familles sont imbriquées les unes aux autres. Une guerre féroce qui veut anéantir l’identité ukrainienne et qui n’hésite pas à endoctriner les enfants en réécrivant les livres d’histoire à la gloire de l’occupant dans les territoires conquis et à proclamer un narratif mensonger qui fait de la victime l’attaquant et le traite même de nazi ! En réplique, les Ukrainiens renient la langue russe, mettent au pilon ou dans des caves poussiéreuses les ouvrages de Dostoïevski, Tchékhov et d’autres ! C’est consternant.
Les haines familiales
Plus on est proche, plus on s’aime ou se hait, ce qui est vrai pour les peuples l’est encore plus dans les familles. Les écrivains se sont emparés de ce thème avec prédilection. J’ai plongé avec délice par exemple, dans le court roman de Guy de Maupasssant, Pierre et Jean, un chef-d’œuvre au niveau de la dramaturgie. Un élément déclencheur, un héritage inattendu pour l’un des fils, Jean va provoquer la rivalité et révéler la haine enfouie jusque-là entre les deux frères. Comme dans une enquête policière, Pierre se lance dans une enquête minutieuse pour comprendre pourquoi il est si désavantagé. Et il finit par trouver la preuve de l’adultère de leur mère. La cellule familiale explose et la paix ne peut revenir que lorsque l’un des deux, Pierre accepte de partir au loin et pour longtemps, peut-être toujours.
Chimamanda Ngozi Adichie, elle aussi, malgré l’ampleur de son sujet, de sa fresque historique, met en scène la rivalité entre les deux sœurs, Olanna et Kainene. Le lien amical de l’enfance est rompu depuis longtemps, elles continuent simplement de se fréquenter à distance, sans véritable échange. Mais c’est en couchant avec Richard, l’amant de Kainene, pour se consoler de la tromperie de son mari qu’Olanna la trahit. « C’est impardonnable », conclut Kainene. Trahison suprême et inutile qui reflète le chaos des sentiments et la violence qui règne dans ce pays en devenir. C’est la guerre qui rapprochera les deux soeurs, cette fois-ci dans une complicité de coeur et de souvenirs, sur fond d’horreur et de violences. Mais c’est aussi la guerre qui fera disparaître l’une des deux, Kainene, comme si la réconciliation fugace était impossible.
Enquêter sur les secrets de famille
C’est en plongeant au tréfonds des secrets de famille que l’on trouve les ressorts de la haine qui régit parfois les relations entre proches. Une haine qui peut s’embraser jusqu’au crime. Les féminicides en sont l’exemple le plus tragique et le plus odieux. Le travail de la commandante Dumoulin dans mon roman Silence de mort dans le Golfe, c’est justement d’essayer de mettre à jour les relations cachées entre les membres d’une famille pour éclaircir deux meurtres sur fond d’ostréiculture en déclin. C’est un long travail d’enquête que je vous invite à suivre, avec une bonne nouvelle : Silence de mort dans le Golfe déjà disponible en version numérique va bientôt paraître en version PAPIER juste à temps pour les vacances. Un petit livre de poche – écrit, je le précise, sans aucun tripatouillage de l’IA – que l’on pourra facilement fourrer dans sa valise et ensuite dans le sac de plage pour le déguster doigts de pieds en l’air, bercé par le grand souffle des vagues. Ou après une rando sublime dans les montagnes.
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Ce blog est gratuit, profitez-en, mais si vous le désirez vous pouvez le soutenir en vous distrayant : je vous propose deux romans de ma plume au choix, l’un sur une aventure franco-allemande, l’autre un polar qui annonce déjà le goût de l’été!

Puisqu’il faut partir (Ed.Complicités). En vente dans toutes les librairies, y compris FNAC et Amazon (Prix 19€) et sur le site des Editions Complicités.
Ce roman évoque la saga d’une famille franco-allemande les Beck, et notamment le héros Dominik, qui quittent la Lorraine en 1789 et repartent dans leur village allemand d’origine. La révolution est sur leurs talons, les troupes déguenillées des Sans-Culottes, puis celles de Napoléon occupent leur village en Hesse rhénane. Sauront-ils survivre aux tribulations des guerres révolutionnaires, peut-être même tirer quelque profit de cette présence française ? Et quel sera l’horizon des nouvelles générations ? L’émigration est le thème de ce roman, qui, je l’espère saura vous captiver…
Si vous préférez vous aérez l’esprit, rendez-vous en Bretagne, pour humer l’air de la mer.
Silence de mort dans le Golfe (Ed.Librinova) Livre numérique. En vente chez Amazon, FNAC, Kobo, librairie Librinova (Prix 4,99€)
Je vous embarque sur la « Petite mer », le Golfe du Morbihan. Deux meurtres en quelques jours dans une famille d’ostréiculteurs : ce n’est pas banal. Surtout dans une région tranquille du Golfe du Morbihan. La commandante de gendarmerie Nathalie Dumoulin est sous pression. Les médias s’impatientent, le procureur aussi. L’affaire fait grand bruit jusqu’à Paris. Au milieu de cet imbroglio, le cœur de la commandante Dumoulin bat la chamade tandis qu’à la gendarmerie les rivalités éclatent. Saura-t -elle s’affirmer ? Elle en doute parfois mais on aurait tort de la sous-estimer.

