Besoin de réconfort et d’évasion

L’hebdomadaire de référence allemand die Zeit a titré récemment sur le thème des remèdes contre les ténèbres. (1) Comment faire face à l’avalanche de drames et de crises que nous déverse l’actualité ? Alors que la guerre en Ukraine fait rage, avons-nous encore suffisamment de réserves psychiques pour la compassion vis-à-vis de toutes les victimes, professeur assassiné, familles israéliennes égorgées, tuées ou déportées, population gazaouie sans eau, sans lumière et sans essence, écrasée par un tapis de bombes et tant d’autres ? Voici quelques pistes pour lutter contre le sentiment d’accablement…

La guerre et la destruction. A quand la paix?
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Fatigué(e)s par un an de crise majeure du Covid, nos ressources psychiques sont limitées, notre impuissance face à ces tragédies rend notre perspective encore plus insupportable. Beaucoup se détournent donc de l’actualité et ne veulent plus être confrontés à ce flot de nouvelles tragiques. À vrai dire, c’est compréhensible, même si cela ne résout rien. Car les drames, eux, continuent. Mais il faut bien trouver des moyens de garder son équilibre. Les psychologues conseillent de limiter la consommation des réseaux sociaux et de se consacrer à des activités qui ressourcent. On peut citer les promenades dans la nature ou le travail dans des associations, comme l’écrit die Zeit.

La fiction pour s’évader

On peut aussi penser aux arts. La littérature par exemple. Loin des discussions politiques qui ont agité à juste titre la Foire du livre de Francfort qui vient de s’achever, rien de plus efficace que d’embarquer seul (e) avec une autrice ou un auteur sur les routes de son imaginaire. À ce sujet je vous propose un entretien réalisé par Radio Rennes à propos de mon roman Puisqu’il faut partir. Il nous emmène loin dans le passé. À l’époque de l’occupation française -notamment par les troupes révolutionnaires, puis Napoléon – de la rive gauche du Rhin. Il montre comment une famille ordinaire de vignerons arrive à traverser et survivre à cette époque de bouleversements …

Radio Rennes, émission il était une fois un livre du 20 0ctobre 2023

L’entretien a été réalisé par Natalie Ramage, journaliste à radio Rennes.

La mélancolie des tableaux

La peinture, elle aussi, permet à nos émotions de s’exprimer. D’après l’hebdomadaire die Zeit, le peintre romantique Caspar David Friedrich connaît un véritable engouement de la part des Allemands. Ses tableaux mélancoliques d’humains perdus dans la nature ont une résonance actuelle.  Le chasseur dans la forêt , explique l’historien d’art et auteur Florian Illies, en est un exemple. « Ses tableaux sont nés sous l’occupation par Napoléon. » Celle justement dont nous parlions. Caspar David Friedrich peint un soldat français vaincu, sans cheval, désorienté dans la forêt. La mort le menace. Mais le peintre, pourtant nationaliste, nous donne à voir sa souffrance. « Il sait voir l’humain dans l’ennemi », constate Florian Illies qui vient de publicer un nouvel ouvrage Zauber der Stille (pas encore traduit- La magie du calme, pourrait-on dire). Et l’historien d’art poursuit dans une interview au magazine économique Handelsblatt (2) « Alors que nous sommes attaqués de toute part par les images atroces de l’Ukraine ou du Moyen-Orient, les tableaux de Caspar David Friedrich parlent de l’Autre, de la puissance de l’art, ses cieux peuvent consoler de l’effroi sur terre, hier comme aujourd’hui. » Les ténèbres ne sont qu’un passage… Il ne s’agit pas de nier notre accablement mais de le transposer, comme a su le faire ce modeste peintre romantique.

Le Chasseur im Walde...
Caspar David Friedrich, Public domain, via Wikimedia Commons

(1) Die Zeit -19 octobre 2023 Nr.44

(2) Handelsblatt Wochenende 27/28/29 Oktober 2023 Nr.208