France-Allemagne : peut mieux faire

Dans un mariage, il est un peu navrant de se dire qu’on reste ensemble parce qu’on n’a pas d’autre choix. C’est pourtant l’impression que donne la relation franco-allemande. Le manque d’enthousiasme se situant ces dernières années plutôt du côté allemand. Mais comme dans un bon vieux ménage, une fois frisée la rupture, on se ressaisit. Cela est d’autant plus évident que nos sociétés se ressemblent de plus en plus, même si elles se connaissent de moins en moins.

Photo Pixabay

Trouver un livre en français dans une librairie allemande relève de la gageure. On vous regarde d’un air navré en vous envoyant sur des ouvrages… en anglais. Je ne cache pas le fait que trouver un livre en allemand dans une librairie française ordinaire est impensable. Mais en Allemagne, pendant longtemps le brillant de la littérature française séduisait, les Instituts français comme celui de Cologne pouvaient organiser des débats qui attiraient les foules – les discussions et confrontations politico-intellectuelles occupaient les gazettes. Aujourd’hui, les impulsions viennent de la Silicon Valley, leurs trouvailles nous bousculent. La dernière en date le Chat GPT basé sur l’intelligence artificielle menace même des pans entiers de nos métiers, voire la création artistique. On sent qu’une nouvelle ère pourrait commencer. Et ce n’est ni la France, ni l’Allemagne qui l’ont lancée.

L’anglais pour tout le monde

On peut le déplorer, mais il n’est pas très étonnant à cette lumière que les élèves d’aujourd’hui fassent un détour pour éviter d’apprendre la langue du voisin, le français ou l’allemand. Trop difficile, trop risqué pour le bac/Abitur, et finalement inutile : tout le monde parle anglais. Et pour avoir de bonnes notes, l’espagnol est plus facile. Avec en prime l’accès à un continent entier- Brésil mis à part. Quant aux éditeurs, qui pourraient permettre l’accès à la littérature du voisin, ils en font le minimum, les chiffres en sont témoins.

Alors, risquons-nous de ne pas nous comprendre ? De nous éloigner l’un de l’autre, ce qui pourrait être fatal ? Je ne le crois pas. Car en réalité nos sociétés se posent les mêmes interrogations : le climat, les fins de mois, les retraites, l’immigration plus ou moins réussie, les loyers qui montent et l’immobilier qui devient inaccessible. Alors que les générations de l’après-guerre– pour résumer à gros traits – se battaient avec des problèmes différents, la dénazification et la reconstruction pour l’Allemagne, la modernisation et la décolonisation pour la France, aujourd’hui les problèmes sont sensiblement les mêmes. Seules les solutions diffèrent parfois. Ou sont décalées.

Prenons un exemple, le chômage dit « structurel » en France. Quelques améliorations calquées sur l’Allemagne ont déjà porté leurs fruits comme, par exemple, l’apprentissage ou la formation professionnelle. Il faudra en faire autant pour le travail des seniors, la France étant lanterne rouge dans ce domaine. Ce ne sont pas ces réformes qui ont résolu à elles seules le problème, mais elles y ont contribué. Les Allemands de leur côté ont beaucoup appris du soin que les Français ont mis pendant la pandémie à garder les crèches et écoles ouvertes autant qu’il était possible. D’une manière générale l’exemple français en matière d’ouverture de crèches a fait avancer le débat allemand et ouvert aux femmes une possibilité élargie de travailler.

Et au total Francais et Allemands ont des modes de vie qui se ressemblent. Les jeunes en particulier écoutent la même musique anglo-saxonnes, voyagent, regardent les séries sur Netflix, vivent longtemps en colocation et ont tendance à ne pas accorder la même priorité au travail ou alors à l’aménager en s’installant par exemple à l’étranger – le fameux nomadisme au travail. Les différences sont plutôt dues à des idéologies politiques, voire nationalistes. Le nucléaire en est un bon exemple.

L’exemple malheureux du Brexit, la violence de l’attaque de Poutine contre l’Ukraine sont donc là pour nous rappeler à la raison. La paix et la prospérité de notre continent ne sont pas des notions poussiéreuses. Et si c’est le cas, alors aux responsables politiques de les faire reluire. La France et l’Allemagne son au coeur de notre continent européen. Cela nous oblige.

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